mercredi 28 octobre 2015

Espace public, politique publique et usages de l’information

       La notion de l’espace public est vaste. Elle implique une dichotomie, espace public-privé. Des contraintes de rationalisation du point de vue politique se posent. Les facteurs qui contribuent à modifier les périmètres de l’espace public sont d’ordre politique, social et culturel. En prenant l’exemple de l’espace public tchadien, qui fait l’objet de notre analyse ; la discussion serait un peu difficile, car la notion de l’espace public dont nous inspirons ; est dans un contexte démocratique, un espace public qui s’est constitué depuis des siècles. Alors que l’exemple que nous citerons ressemble un peu à l’espace public médiéval, de l’Europe.  La liberté d’exprimer librement ses opinions n’existe pas dans l’espace public tchadien. En analysant les différents facteurs : politique, social et culturel du Tchad, qui modifient les périmètres de l’espace public tchadien ; nous en déduirons que ces facteurs affectent les usages de l’information au Tchad.
      
        L’espace public peut prendre le sens de l’Etat, avec des règles juridiques ; toute entité politique peut être un espace public. La démocratie libérale tant à être la règle universelle. La constitution d’un espace public est violente ; puisque la construction de l’espace démocratique implique des dissensions entre un espace public et privé. Les régimes dictatoriaux d’avant la chute du mur de Berlin, n’ont pas favorisé la constitution d’un espace public tchadien. Il n’existait aucune presse indépendante ; et celle qui fonctionne est au service de la propagande du parti unique et le culte du chef de l’Etat. Dans ce cas, peut-on parler d’un espace public ou privé ?
« Pas d’espace public sans liberté et égalité des individus[1] », écrit Dominique WOLTON, dans son essai, Penser la communication.   L’exemple de l’espace public que nous citons est celui du Tchad.  Ce pays à une évolution sociopolitique très controversée : de la colonisation à la lutte des libérations et aujourd’hui la démocratisation de l’espace public qui se construit. Un moment d’insécurité et d’incertitude politique. Dans la constitution de cet espace public tchadien en cours, l’aspect sociologique et anthropologique fait en sorte que, la démocratie occidentale a dit du mal à s’imposer comme règle de gouvernance et d’administration ; l’ethnocentrisme se heurte à la politique ; recours aux groupes ethniques, ou une suprématie d’une ethnie dirigeante s’impose contre une autre rivale, est toujours courant. La constitution des parties partis politiques se fait sur base ethnique ou régionale, le multipartisme est devenu tribalisme ; d’où le risque d’échec de ce système de gouvernance en Afrique ; particulièrement au Tchad. Le refus de respecter les verdicts des urnes ; la prolongation du mandat, du candidat président, faite en modifiant la constitution. La démocratie pluraliste imposée en Afrique, n’est pas compatible avec les réalités sociologiques et anthropologiques du pays ; le réflexe de l’acceptation d’une autorité monarchique est présent dans l’inconscient collectif. Les études sont peu, mais la réalité nous amène à se poser la question : quelle démocratie, pour quelle société ? Autrement dit, un système de gouvernance démocratique, inspiré des réalités sociales, anthropologiques et culturelles, s’impose.
Toutefois, on peut parler d’un espace public, dans la mesure où, il existe une autorité qui règle la vie publique, même si elle ne remplit pas sa mission, conformément aux valeurs  de démocratie occidentale. Comme nous avons affirmé ci-dessus, la genèse de la société tchadienne est tribale, dont il existe ce que Dominique WOLTON appel la logique de l’irrédentisme communautaire ; ceci nous permet d’affirmer l’affrontement entre l’espace public et privé. Dans le contexte que nous avons pris comme exemple, les tribus ou ethnies se disputent, de fois de manière violente l’espace public ; conflit agriculteur et éleveur par exemple. Il faut aussi énumérer les mutations sociales : l’exode rural, l’urbanisme, les déplacés économique ou écologique, dû à la sécheresse et au manque des pâturages, etc. Ces mutations et mouvements sociaux entraînent le pouvoir public à prendre, un certain nombre des mesures, citons comme exemple, la tracé des couloirs des transhumances pour les éleveurs, dans l’objectif d’éviter les affrontements entre agriculteurs éleveurs. Les médias jouent, aussi un rôle important dans le secteur du développement agropastoral. La radio nationale tchadienne, la RNT, seul support médiatique au service de l’Etat, diffusait dans ses grilles de programme, des émissions destinées aux éleveurs et agriculteurs et en langues nationales. Le pouvoir public est de fois confronté à la réticence de la population ; et difficile de contrôler l’espace public aux occupations anarchiques. Il faut aussi noter une spécificité africaine et donc tchadienne aussi, l’espace public traditionnel, l’arbre à palabre. La place sur laquelle les grandes décisions gérant la cité, seront prises. Cet espace public traditionnel s’est incliné devant celle, des nouveaux espaces public, la place de l’indépendance ; la place sur laquelle, les grandes festivités, comme 14 juillet au temps colonial et aujourd’hui place de l’indépendance.  La disparition de l’espace public traditionnel, amène avec elle  la médiation sociale.  L’espace public tchadien est en construction, s’il faut tenir compte de l’aspect culturel, le Tchad est aussi dans la modernité.
Il existe une dimension culturelle  de l’espace public. Dans les grandes agglomérations s’est formée une culture homogène ; les différents groupes ethniques cohabitaient dans les villes. L’existence de l’espace public culturel ne pourrait qu’exister en ville. Il faut noter l’influence coloniale qui a imposé la langue française, donc la culture française, les traditions et l’influences de la culture arabo-musulmane du fait de la position géographique à cheval entre l’Afrique noire et l’Afrique blanche. 
L’avènement des nouveaux médias, dû à la prolifération des antennes paraboliques et le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication ont vite consolidé l’espace public tchadien, du point de vue culturel. On peut affirmer que les médias font parties de l’espace public culturel tchadien. Le développement accéléré des TIC contribue au développement d’une culture homogène  et donc à la naissance d’un espace public tchadien.
L’espace public tchadien est en cours de construction  s’il faut se référer à la définition de la notion  dite de l’espace public en Europe. Mais, l’universalisme numérique exigerait une convergence démocratique de la planète.
La politique publique au Tchad a toujours contrôlé les rares supports qui y existaient : l’agence Tchadienne de Presse, la Radio Nationale Tchadienne et autres stations dans les préfectures en province. Mais, le développement des Techniques de l’information et de la communication a affecté  le changement social qui se produit. Le contrôle des médias et de l’information échappe au régime, dit démocratique mais autoritaire. Ces modifications obligent le pouvoir public à se conformer aux exigences de l’ère du numérique. Ce qui a conduit le gouvernement du Tchad à mettre la seule télévision nationale sur satellite pour être couvert sur l’ensemble du territoire et à l’étranger. Il faut aussi noter la multiplication des sites internet et blogs qui informent l’opinion nationale et internationale. Alors face aux récents conflits armés de 2006 2008 au Tchad, le gouvernement n’arrive plus à contrôler le flux des informations diffusées par téléphone satellitaire et internet.

            Le Tchad un pays émergent, situé au cœur de l’Afrique noire. Un pays né de la colonisation française. La constitution de cette entité politique forme la fusion des espaces privés en phase de construction d’un espace public, au sens européen du terme.  Cette émergence politique et sociale a dégénérée et a du mal à arriver à terme.
Toutefois, on peut parler d’un espace public tchadien ; même si les règles de gouvernance démocratique sont escamotées. Le pouvoir public a toujours contrôlé la diffusion de l’information, puisque, l’Etat détient le monopole des supports médiatiques qui existaient.
Avec le développement des nouveaux outils de l’information et de la communication le pouvoir public est affecté de l’usage de l’information. Puisque ces transformations sociales qui orientent le Tchad, vers la démocratisation sont les causes directes, de l’incapacité de l’Etat à contrôler l’information. 
L’ère du numérique affecte toutes les politiques publiques et se constituent un espace public universel et alternatif. Aucune politique publique ne peut être à l’abri des turbulences de cette révolution du numérique.

Mahamat HASSANE BOULMAYE





[1] Dominique WOLTON, Penser la communication, Paris, Flammarion, 1997, P. 165 

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